AccueilLa UNETunis : «Il faut savoir arrêter une grève ». Dixit Jean Jaurès

Tunis : «Il faut savoir arrêter une grève ». Dixit Jean Jaurès

Foyer de tension ou de révolution (cela dépend du type de gouvernement en place), le bassin minier n’a pas cessé depuis des décennies, depuis Bourguiba (Tentative de coup d’Etat, le 26 Janvier 1980 téléguidée de Libye) et jusqu’à Ben Ali (28 ans après en janvier de l’année 2008), d’être une source de problèmes pour les gouvernants de la Tunisie moderne. Ce qui se passe dans cette région minière, productrice de phosphate, a toujours eu un lien avec la CPG, le Compagnie de phosphate de Gafsa. Aux portes du désert, économique et d’infrastructure, Gafsa n’avait toujours eu que la CPG pour seul employeur.

– Au début, il y avait un 5 janvier 2008

«C’est à l’occasion d’un concours d’embauche de la CPG que la révolte éclate le 5 janvier 2008 à Redeyef. Mille candidats se présentent pour seulement 81 postes à pourvoir Les résultats affichés sont jugés frauduleux, ne respectant pas les accords en termes de quotas pour les fils de mineurs. Les contestataires installent des tentes afin de bloquer la circulation des trains entre les carrières et les usines de la CGP, bloquant la production. Ils seront bientôt rejoints par des veuves de mineurs et leurs familles. En signe de protestation, de jeunes chômeurs occupent le siège régional de l’UGTT à Redeyef, dénonçant une politique de l’emploi injuste et un potentat local, Amara Abassi, à la fois patron de plusieurs entreprises de sous-traitance pour la CPG2, éminence de l’UGTT régionale et député du RCD» (Sic : Wikipédia). 2010, Ben Ali s’enfuit et une année plus tard, le même scénario de janvier 2008 se répète à Gafsa, toujours à cause des recrutements, et dure depuis avec une récurrence des mêmes causes entraînant les mêmes effets pour les cinq gouvernements qui se sont succédé en Tunisie depuis la chute de Ben Ali.

– Et depuis, la récurrente question des recrutements

Dans un communiqué rendu public mardi 21 avril, le ministère tunisien des Affaires sociales annonçait «l’annulation de la grève des agents et des cadres de la Compagnie des Phosphates de Gafsa, prévue aujourd’hui, 22 avril 2015». Deux jours plus tard, alors qu’une délégation ministérielle se déplaçait à Gafsa, pour essayer d’enrayer la mécanique des grèves et faire redémarrer la CPG, des journalistes ainsi que des responsables régionaux, étaient pris en otage par des grévistes. Le 24 du même mois, grèves, sit-in et camping sur les voies ferrées du transport du phosphate reprennent alors qu’Adnane Hajji, leader, électron libre syndical et député de la région, s’écriait sur les ondes de la Radio nationale affirmant que «le travail ne reprendra pas tant que les demandes des contestataires ne seront pas exécutées par le gouvernement » d’un Habib Essid qui devait lui-même se rendre dans la région. Ce sont, cependant, des demandes qui renvoient à d’autres demandes, qui restent toutes, à notre avis, problématiques. D’abord, selon Adnane Hajji, la libération de 300 ouvriers, objet de procès en justice suite à des actions de «protestation» et l’arrêt de toutes poursuites à leur encontre. Ceci est en soi contraire au principe constitutionnel d’une justice indépendante. Abandonner les poursuites et libérer les prisonniers, c’est arrêter l’application de la loi, alors qu’elle devrait être égale pour tous. L’autre demande des «mutins» de Gafsa, selon Hajji, est de «trouver une solution pour les 7500 employés des sociétés de l’environnement. Hajji lui-même déclarait plus tôt que ces sociétés n’ont aucune existence légale et assimilait les salaires qui lui étaient versés à une mauvaise gestion de l’Etat. Les mutins revendiquent aussi et surtout la révision de la liste des recrutements.

– Tous à la CPG ou le développement qui ne se fera pas !

Or, en enlever un seul nom ou y ajouter un autre, équivaudrait à rallumer le feu de la discorde, dans une région gouvernée par les clans familiaux et tribaux. Des recrutements aussi qui sont le seul espoir de milliers de Gafsiens qui veulent tous travailler à la CPG où les salaires débutent à plus de 1000 DT par mois. Des recrutements pour une CPG qui fait actuellement travailler plus de 13 mille personnes, directement et indirectement, où la masse salariale mensuelle est de 250 MDT, les pertes de 4000 MDT en 3 ans et pour qui le déficit n’est plus loin (2013 bilan juste équilibré, disait le chargé d’information de la CPG, vendredi dernier, à la radio nationale). Restera, bien sûr, la demande d’une solution pour les dizaines sinon plus de sit-inneurs qui bloquent la production et qui voudront tous aussi rejoindre les 13 mille de la CGP. Cela équivaudrait aussi à remettre sur la table l’épineuse question des recrutements et les désaccords locaux à ce propos qui pourraient remettre le feu aux poudres des grèves et autres mouvements sociaux à Gafsa. Tous demandent le développement, synonyme de création d’emploi. Tous veulent tout et tout de suite. Personne ne veut cependant revenir au travail ou laisser le travail reprendre à la CPG pour y dégager de quoi financer le développement de la région. D’autres universitaires proposent de créer dans la région d’autres alternatives de travail. Ils pointent du doigt les opportunités en matière d’agriculture. Ils reconnaissent, pourtant, comme Mustapha Tlili, que les jeunes désertent cette activité. Que faire donc ? Appliquer la loi, impliquer tous les partis dans un discours national et unifié qui appellera la population à la patience, mettre les bases d’un développement global de la région, ou céder encore une fois aux menaces et aux grèves et laisser mourir une entreprise et tout un pan de l’économie ?

– Qui prendra la défense d’Essid ?

Gafsa est une région enclavée, guère attirante pour les investisseurs, dans n’importe quelle activité économique. Pour la désenclaver, il faut des infrastructures, routières ou autres. Cela demande du temps et de l’argent. L’Etat tunisien est endetté à plus de 51,5 % de son PIB et la CPG est au bord de la faillite. Payeur de très bons salaires, la CPG est la proie de toutes les envies des habitants de la région. De surcroît, ceux de Gafsa, comme tous les Tunisiens, ne croient pas encore que les caisses de l’Etat sont presque vides et demandent toujours que l’Etat leur dise toute la vérité à ce propos. Tête pourtant bien faite et historien de la région, Mustapha Tlili ne disait-il pas vendredi à la radio nationale que «le discours du gouvernement est anémique». Qui croira ce gouvernement alors et qui prendra sa défense ou se mettra de son côté alors ? Pour l’instant, personne ne bouge dans les rangs des partis politiques au pouvoir. Dans l’opposition, tous semblent espérer que Gafsa fera tomber Essid comme elle a fait tomber Ben Ali !

Jean Jaurès ne disait-il pas: «Il faut savoir arrêter une grève »

Khaled Boumiza

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