Dans une allocution télévisée adressée au peuple tunisien, le chef du gouvernement Habib Essid a annoncé la mise au point d’un plan de salut national pour rétablir la confiance dans le pays. Ce plan qui couvre en principe les cinq prochaines années, repose sur « l’étude de la situation actuelle, prône des décisions immédiates pour redresser la situation économique et sociale et présente une vision d’avenir ».
Ce plan à vocation stratégique répond, selon Essid, aux exigences d’une économie fragile marquée par 740MD de déficit budgétaire en 2014, un recul de 21% du taux d’investissement, une inflation en hausse dont le taux (5.6% ) est bien supérieur au taux de croissance(2.3%), sans oublier l’épineux problème du chômage des diplômés ( 31%). A cela s’ajoute le non application des conventions signées pour la majoration salariale dans la fonction publique dont le coût financier est estimé à 200 millions de dinars, les déficits des caisses sociales qui sont de l’ordre de 1.1 milliards de dinars et les déficits des entreprises publiques qui coutent annuellement à l’Etat plus de 3 milliards de dinars.
Habib Essid a commis une erreur et la crise sera aggravée…
Ce plan est largement critiqué. L’ex ministre des finances Houcine Dimassi n’a pas manqué d’affirmer que le discours du premier responsable n’a pas apporté de nouveautés malgré la reconnaissance de la délicatesse de la situation actuelle.
Dans un entretien téléphonique avec « Africanmanager », il a assuré que ce plan mise en premier lieu sur les recettes que devraient générer les secteurs touchés depuis la révolution, principalement le phosphate.
Notre interlocuteur a, par ailleurs, souligné que le chef de gouvernement a commis une erreur en annonçant l’application d’environ 17 conventions, conclues avec l’UGTT et le démarrage des négociations relatives à la majoration dans la fonction publique pour l’exercice 2014.
D’après Dimassi, l’augmentation des salaires n’améliorera pas le pouvoir d’achat dans un mauvais climat économique, elle provoquera, cependant, une inflation qui entrainera la dévaluation du dinar.
Des mesures « vigoureuses » prévues en absence d’une stratégie claire
De son coté, le député Ammar Amroussia, député du Front Populaire(FP) a estimé que ce discours est une introduction pour la mise en place des mesures « vigoureuses et non populaires » qui vont toucher la classe moyenne et faible.
Amroussia a, dans le même contexte, précisé au site « Hakaekonline » que le gouvernement d’Essid est en train de préserver la même ligne menée par ses prédécesseurs.
Critiquant la prolifération de la corruption, Amroussia a mis en garde contre une autre crise qui pourrait conduire à un soulèvement populaire contre cette équipe ministérielle.
Un avis est partagé par Zouheir Maghzaoui (Mouvement du peuple) qui s’est dit étonné par le discours du Chef du gouvernement qui n’a pas dévoilé une stratégie « claire » capable de remédier à la situation que secoue le pays depuis des années. « Habib Essid n’a pas présenté un projet national capable de résoudre la crise actuelle, d’autant plus qu’on n’a pas vu des projets concrets visant à promouvoir le développement dans les régions », a noté Maghzaoui à « Africanmanager »
Taux de croissance de 7% exagéré…
La vague de critique continue à prendre de l’ampleur. Dans cette optique, un expert en économie ayant préféré garder l’anonymat nous a assuré que les estimations présentées par le premier responsable sont exagérées. « Essid affirme que son gouvernement table sur une croissance de 7%, en engageant un nouveau modèle de développement. On dirait qu’il est en train de parler d’un autre pays, peut-être de la Chine», a t-il dit.
Wiem Thebti
