Encore une fois, l’UGTT hausse le ton et redit son attachement à l’ouverture de négociations sociales. C’est aux journées de l’entreprise qui se sont tenues à Sousse le vendredi et samedi dernier que Houcine Abbassi, secrétaire général de l’UGTT a appelé le gouvernement de Mahdi Jomaa à entamer l’examen de ce dossier épineux dans le but ultime d’augmenter les salaires dans le secteur public.
Pour la centrale ouvrière, cette position n’est par arbitraire, affirmant que « si les négociations vont être reportées jusqu’à la mise en place du prochain gouvernement, cela prendra plus de temps vu que ce dernier n’a pas encore été formé et donc n’existepas avec sur les bras une crise à laquelle il n’a lamais été associée ».
L’appel de Houcine Abassi ne semble pas avoir trouvé réponse auprès du chef du gouvernement qui a préféré que ce dossier soit l’une des responsabilités du prochain gouvernement, soulignant cependant que son équipe ministérielle s’est employé dès l’abord à associer l’UGTT à ses concertations.
L’épineux dossier des augmentations salariales et des négociations sociales reste, néanmoins, l’une des principales pommes de discorde entre les deux parties surtout dans cette phase actuelle marquée par la montée de grogne sociale dans maints secteurs vitaux. C’est le cas de l’enseignement secondaire dont le syndicat par le biais de son secrétaire général Lassaad Yaacoubi a annoncé sa décision de maintenir la grève prévue lundi 8 décembre en raison de l’échec des négociations avec les parties concernées, portant notamment sur l’annulation des prélèvements des salaires à la suite de la grève observée les 26 et 27 novembre 2014.
Le blocage que connaissent plusieurs secteurs économique et la tension qui ne cesse de prendre l’ampleur entre le gouvernement et l’UGTT appellent une lancinante interrogation: la demande d’une majoration salariale est-elle raisonnable dans pareille situation où encore le budget de l’Etat n’est pas encore promulgué par l’Assemblée des Représentants du Peuple (ARP) ?
La demande de l’UGTT est justifiée !
Pour Fethi Nouri, expert en économie, l’appel récurrent de l’UGTT pour l’augmentation des salaires des fonctionnaires dans le secteur public est justifié, économiquement parlant.
Dans un entretien téléphonique avec « Africanmanager », il s’est appuyé sur deux critères qui plaident pour la majoration salariale. Il s’agit de la productivité et du pouvoir d’achat. « Si on se base sur le critère de la majoration due à une hausse de la productivité, on peut affirmer qu’il est possible de réviser à la hausse les salaires car les travailleurs continuent à participer à la création de la richesse sachant qu’elle est faible et pourtant elle existe », a dit Nouri avant de rappeler que cette productivité a connu un recul durant les trois années de la révolution passant de 2,7% en 2010 aux alentours de 1% en 2014.
Pour le second critère lié au pouvoir d’achat, il a indiqué que l’UGTT est bel et bien raisonnable dans ce climat où le pouvoir d’achat des travailleurs s’est détérioré pour s’établir à 0.7% durant ces dernières années.
La demande de la centrale est certes correcte, mais avec une lecture approfondie du bilan macro-économique du pays dans son ensemble, elle est encore difficile pour l’équipe ministérielle de Jomaa. Car, accabler le budget par une telle augmentation serait bien évidement un fardeau lourd pour l’équilibre budgétaire, a ajouté Fethi Nouri. C’est pour cette raison que l’actuel gouvernement a maintenu sa position de ne pas s’impliquer dans les négociations sociales en refilant la patate chaude à son successeur.
Wiem Thebti
