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Tunis : Un «ping-pong» tendu Bouchammaoui-Abassi à Sousse, qui finit en queue de poisson

La fin de la 29ème session des Journées de l’entreprise à Sousse aura été marquée par une acérée mais pathétique empoignade verbale entre la présidente du patronat tunisien Wided Bouchammaoui et le SG de la centrale syndicale ouvrière Houcine Abassi. Un face-à-face qui a ressemblé plus à une confrontation qu’à un début de négociation sociale qu’attendait le patronat entre deux vrais partenaires sociaux.

Manifestement pris au dépourvu par le thème de cette matinée du samedi 6 décembre 2014, qui était la flexibilité de l’emploi, ce dernier paraissait tendu, les réactions à fleur de peau avec un sens aigu de la réplique qui frisait parfois l’arrogance et le sentiment de la supériorité en face d’un patronat qui restait «à portée de grève». Surtout, il n’appréciera pas non plus les interventions des représentants de l’OIE (organisation internationale des employeurs) et de l’UIS (Union internationale des syndicats) qu’il a prises peut-être pour une tentative de pression sur lui.

La séance fut ouverte par Chakib Nouira, l’ancien président de l’IACE qui a endossé les habits du modérateur. C’est ensuite la patronne des patrons qui ouvre le feu, allant directement sur le champ de bataille et abordant sans détour le sujet qui fâche, celui de la productivité et de la flexibilité que demandent les investisseurs, tunisiens et étrangers et plus tard, directement la sous-traitance dans le secteur privé.

– Les 3 NON de Houcine Abassi pour la flexibilité de l’emploi

Tout de suite, Abassi décide de se détacher du texte préparé par ses lieutenants et commence par interpeller les organisateurs leur reprochant de ne pas avoir coordonné avec ses services concernant le thème de la séance où il était présent. Il dira même qu’il aurait fallu laisser de côté ce thème de la flexibilité et aborder celui du mixage entre l’économique et le social, car, pour lui, «ce qui intéresse les économistes ne donne la part belle qu’à la réussite économique et n’accorde que peu de cas du côté social, et cela ne peu plus continuer », dit-il avec assurance et un zeste d’arrogance.

Manifestement débordé, le médiateur Chakib Nouira essaie vainement d’arrêter Houcine Abassi pour orienter le débat vers une inter-réactivité avec le public. Sourd à ses appels, le SG de l’UGTT s’embarque dans une leçon d’histoire aux patrons sur les droits conquis par la classe ouvrière, les accusant de vouloir les remettre en cause, menaçant même de s’en aller s’ils ne le laissaient pas faire. «Si vous ne voulez pas m’entendre, vous pouvez continuer seuls», dit-il avec un jaune sourire. Le SG utilisera encore la menace latente lorsqu’il évoquera, une première fois, le retour «à Dieu ne plaise » dit-il, en cas de réussite du capitalisme. Et de dire, une seconde fois en guise d’avertissement, «vous avez vu comment Ben Ali a été un bon élève [ndlr : des instances financières internationales] et oublié le social, ce qui amené la révolution, et c’est un bon exemple à méditer» !

De prime abord, Houcine Abassi se braque lorsqu’on lui parle de flexibilité. Il répètera à satiété son refus catégorique de la flexibilité de l’emploi, et manifestement remonté contre certains patrons, il ne manque pas de rappeler au patronat les débordements de certains de ses membres lorsqu’il s’agit de pratiquer la flexibilité. Pour lui, ce terme rime avec précarité. Pour le SG de l’UGTT, ce concept, comme celui de la productivité, est une invention de l’économie mondialisée et des forces capitalistes qu’il refuse et dont il est plutôt un fervent détracteur. C’est aussi pour lui «un blanc-seing pour spolier et mettre la main sur les acquis» des ouvriers. Devançant même les propos de ses hôtes, Abassi se prononce contre tout lien entre salaire et productivité qui ne peut être établi qu’avec des incitations supplémentaires.

– Un ping-pong, risible, mais digne des plus houleuses séances de Dialogue social

La patronne des patrons essayera de calmer l’auguste invité de l’IACE, en lui expliquant que le but de cette rencontre était simplement d’expliquer le concept de la flexibilité, se mettant ainsi de fait, dans une position défensive face à Abassi. «La flexibilité que nous demandons n’est pas pour spolier les droits des employés », dit Wided Bouchammaoui qui se sent même obligée de faire un pas de plus en arrière, en fustigeant ceux qui le feraient et en se défendant de protéger quiconque le ferait.

Le ping-pong des interventions entre Utica et UGTT se répètera plus d’une dizaine de fois dans ce qui ressemblait de plus en plus à capharnaüm de réactions dans un dialogue social où Abassi ne voulait entendre que sa propre voix et où Bouchammaoui essayait vainement de l’amadouer, comme lorsqu’elle essaie de lui rappeler le nombre croissant de chômeurs face à un besoin, tout réel en main d’œuvre des patrons et qu’il lui rétorque que «la flexibilité n’est pas la solution». Comme dans un dialogue de sourds, la patronne de l’Utica l’interrompt pour demander «on fait le pari sur une année ? » et que le SG de l’UGTT lui répond, en oubliant presque son français, que «la solution est que les patrons retroussent mettent fin à leur hésitance [dit tel quel par Abassi] leurs manches et investissent, car la flexibilité est une exploitation des efforts et ne donnent pas la tranquillité». Il évoque, en riant le «civipé» en demandant qui connaîtrait le vrai nom et rappelle que les incitations ne manquent pas pour les vrais investisseurs à l’intérieur du pays. Bouchammaoui lui répond alors, toujours dans un débat que personne n’arrivait à maîtriser, que «les incitations sont absentes, tout comme l’infrastructure, en plus des demandes exorbitantes des employés qui alourdissent les finances des entreprises. Sans en démordre, Abassi lui répète de manière presque autiste, que «la flexibilité n’est pas le seul déterminant de l’investissement ». Bouchammaoui se laisse aller et évoque alors la sous-traitance, et le SG de l’UGTT lui rétorque que «la sous-traitance nous a créé une mondialisation diabolique et si nous disons oui pour le secteur privé, ce qui est un sujet à part, l’Etat pourrait y penser de nouveau. Comme dans un jeu de chaises musicales, Wided Bouchammaoui saute sur l’occasion et lance en criant presque dans la salle toute en brouhaha : «prenez acte que nous allons entamer des négociations à ce propos». Se sentant pris au piège, le SG de l’UGTT se rattrape, recule et corrige que «il n’y a pas de négociation à propos de la flexibilité.

Ce ping-pong social, dont les deux principales caractéristiques auront finalement été l’autisme de l’UGTT et la faiblesse du patronat, se terminera en plus en véritable queue de poisson, lorsque l’un des membres de l’IACE répondra, de manière politiquement incorrecte à la demande de Houcine Abassi de faire participer l’UGTT à l’élaboration des thèmes de ses journées. Furieux, Houcine Abassi, sera plus politiquement incorrect en utilisant une expression, fort déplacée. Un homme d’affaires, membre de Nida Tounes, éprouvera le besoin de désavouer le membre de l’IACE dont le président se retrouve obligé de prendre le parti de son auguste invité.

Bou. Kha

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