AccueilLa UNETunis-Présidentielles : BCE versus Marzouki, le Nord appelle le Sud

Tunis-Présidentielles : BCE versus Marzouki, le Nord appelle le Sud

Les chiffres sont têtus. Ils assènent parfois des vérités irréfutables, quelle que soit la lecture qui en est faite. Des vérités qui font parfois peur, mais qu’il ne faut pas, à notre sens, cacher, tant elles ont été une des causes de la révolution et tant elles ont constitué aussi le menu principal des campagnes des deux candidats au second tour de ces présidentielles inédites en Tunisie depuis plus de 50 ans de République.

Les chiffres en question sont ceux de la répartition des votes par régions et par candidat au 1er tour. Loin de vouloir verser dans le régionalisme que nous dénonçons vivement par ailleurs, force est de constater que le vote du 23 novembre 2014 a manifestement donné un avantage à Moncef Marzouki dans les cinq circonscriptions du sud (Kébili78%, Tataouine 76%, Gabès 73%, Médenine 69% et Tozeur (60%). Mais un avantage moins prononcé a été accordé au même candidat dans les circonscriptions de Sfax1 (45%),Safax2 (41%) Kairouan (37%), La Manouba (35%), Kasserine et Zaghouan (33% chacune) Ben Arous (32%) Bizerte (31%) et l’Ariana (30%), ce qui est de nature à nuancer le tableau. La Tunisie serait-elle pour autant divisée en deux ? Ce tableau est beaucoup plus complexe et désordonné pour ce qui est des faits, et il l’est encore davantage pour les politologues et observateurs dans leur effort de comprendre et d’expliquer .Et la tâche sera d’autant plus ardue pour les politiciens qu’ils doivent inverser les tendances dès les prochains jours en prévision du second tour, et pour les mois et années à venir, pour assurer une présence effective pour les uns et pour les autres, dans ces régions. Mais on peut déjà dire que ces résultats constituent un piège pour Marzouki, qui a fait valoir, à travers ses discours, mais aussi par les interventions de ses porte-paroles sur les plateaux de télévision, deux thèmes majeurs, à savoir la marginalisation de ces régions en matière de développement et la répression anti-youssefiste qui se serait abattue sur les citoyens y résidant plus que d’autres. Or, Marzouki ne va rien pouvoir faire pour ces régions sur le plan développement parce que le dossier ne relève pas de ses prérogatives, en plus du fait qu’il se positionne déjà en frein à la bonne marche des institutions de l’Etat, donc à l’exécution des projets de développement dans la perspective de contrecarrer l’hégémonisme du parti majoritaire. La répression anti-youssefiste est un dossier national qui doit être traité dans le cadre de la justice transitionnelle, et on peut dire déjà que cette démarche ne peut aboutir que si elle est dépassionnée, et ayant prise sur le conjoncturel et surtout les tiraillements politiques et les tensions induites par le climat de la campagne électorale.

Il n’est pas exclu que le deuxième tour permette des reports de voix dans plusieurs circonscriptions, mais la configuration générale peut rester la même : le Nord et une partie du Sahel voteraient pour BCE (Béji Caïd Essebssi), le Centre-ouest et le Sud voteraient, plus ou moins massivement, pour Moncef Marzouki, avec des percées ça et là pour l’un comme pour l’autre. Mais le jugement qu’il faut porter sur le choix de l’électeur doit tenir compte du fait qu’il s’agit d’un comportement électoral qui peut par essence changer par la discussion et la persuasion et non une attitude émanant d’une structure mentale et psychologique, de spécificités civilisationnelles et de particularismes culturels, comme veulent le faire accréditer Marzouki et ses porte-paroles.

Au contraire, ce sont des attitudes politiques qui prennent racine dans une réalité adossée à des choix économiques et en matière d’infrastructure, faits par les anciens régimes ou imposés par les impératifs de l’économie globale, qui ont abouti à ce qu’une partie du pays bénéficie plus que l’autre de ces choix en matière de développement. L’une aspire à plus de développement et à une meilleure qualité de la vie et l’autre simplement à vivre comme la première.

Mais, depuis la Révolution, cette réalité a pris un autre aspect se déclinant dans deux architectures économiques différentes. La première, au Nord, est réelle et la seconde, au Sud, est informelle. Après la révolution, cette différence économique s’est confirmée. Presque tout le Sud tunisien vit en effet du commerce avec la Libye et toute fermeture des frontières entre les deux pays produit tout de suite un impact social. Le Sud-ouest et le Centre-ouest vivent essentiellement du commerce transfrontalier avec l’Algérie. La quasi-absence d’un tissu industriel dense placerait même ces deux parties d’une même Tunisie, sous des régimes fiscaux différents. A tout cela, il faudrait ajouter que le Sud est, depuis la révolution surtout, la destination de toutes les actions de contrebande de toutes sortes de marchandises, avant la révolution libyenne, vers la Tunisie et, depuis la révolution, de la Tunisie vers une Libye en guerre.

De quel côté se rangera la Tunisie lors du second tour des présidentielles ? A défaut d’un travail politique de longue haleine, dont sont redevables les partis politiques, la réponse viendra certainement des urnes, et elle peut surprendre, comme cela a été le cas au premier tour !

- Publicité-

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

Réseaux Sociaux

108,654FansJ'aime
480,852SuiveursSuivre
5,135SuiveursSuivre
624AbonnésS'abonner
- Publicité -