AccueilLa UNETunis : L’instance Vérité et Dignité… une justice controversée!

Tunis : L’instance Vérité et Dignité… une justice controversée!

L’une des revendications majeures des Tunisiens au lendemain de la chute du régime Ben Ali était et demeure que justice soit faite pour ceux qui ont été victimes de toutes les formes d’injustice, exactions, tortures et autres pratiquées par le régime déchu

Une commission nationale d’investigation dirigée par l’ancien président de la Ligue Tunisienne des Droits de l’Homme(LTDH) Taoufik Bouderbala, a été constituée pour établir la vérité sur les tueries qui ont eu lieu dans la période entre le 17 décembre 2010 et le 14 Janvier 2011.

Elle a entamé son travail le 18 février 2011, se rendant dans les prisons, les services judiciaires et administratifs ainsi que dans les hôpitaux, mené ses investigations, écouté les familles des victimes pour élaborer son rapport. La mission de la commission nationale d’investigation prendra fin le vendredi 4 mai 2012, date à laquelle son président a présenté son rapport final.

S’agissant des malversations financières, une autre commission d’Investigation sur la Corruption et les Malversations sous la présidence de feu Abdelfattah Omar a été instituée après la Révolution et présenté le rapport de ses travaux le 10/11/2011 au président de la République, renfermant dans chacune d’elles un tas de révélations, de secrets, de dépassements, d’abus, d’escroqueries, de détournements, de trafics d’influence…. 335 pages qui parlent ouvertement de ce qui a été spolié par l’ex-président de la République, sa famille, celle de sa femme, ses proches, ses collaborateurs, ses conseillers et tous les intervenants dans le giron de la famille régnante pendant 23 ans.”

Ces efforts, bien que menés de manière méthodique et systématique, sont restés parcellaires et incomplets, ce qui a mis en évidence la nécessité d’engager le processus de la Justice Transitionnelle où pourraient intervenir les différentes parties prenantes. Un nouveau comité constitutionnel devrait se charger de rassembler les preuves afin de dévoiler la vérité et de relancer les processus judiciaires contre ceux qui ont participé à des actes jugés graves et cités dans le texte de création de cette instance.

De ce fait, une instance dénommée « Instance Vérité et Dignité (IVD) » a été instituée conformément à la loi du 14 décembre 2013 sur la Justice Transitionnelle. L’IVD a vocation à recenser et indemniser les victimes des abus des régimes de Ben Ali et de Bourguiba.

L’activité de l’IVD couvrira la période qui s’étend du 1er juillet 1955 jusqu’à la date de la promulgation de la loi. La durée de son mandat est fixée à quatre années, à compter de la date de nomination de ses membres, renouvelable une fois pour une seule et unique année suite à une décision motivée de l’Instance et soumise à l’Assemblée des représentants du peuple.

En effet, et en l’espace de quelques mois de sa création, l’IVD n’a pas arrêté de faire l’objet de plusieurs contestations et polémiques suite à la démission de 3 de ses 15 membres.

Après celles de Khemais Chammari, quelques jours après la répartition des tâches au sein de l’IVD et d’Azouz Chawali, voilà qu’une troisième défection en la personne de Noura Borsali n’a pas tardé d’intervenir.

La nomination même des membres de l’Instance est sujette à controverse. Les 15 membres de l’IVD sont accusés d’être désignés sur la base de leur appartenance politique par une Assemblée nationale constituante (ANC) à forte coloration politique. Ils sont donc loin de faire l’unanimité autour de leurs personnes et peut-être bien sur le résultat de leur travail, une fois accompli au bout de cinq ans.

Déjà, il y a divergence autour de la méthode de travail, et même les textes fondateurs de l’Instance sont remis en question par le dernier membre démissionnaire. Noura Boursali a émis le souhait de voir la loi sur la justice transitionnelle révisée, aussi bien que la composition de l’instance et sa présidence avant d’ajouter : « Il faut que la composition de l’IVD soit revue sur la base de la compétence, d’après le passé militant des personnes, et surtout sur la base de l’impartialité».

Une première polémique a éclaté en septembre dernier entre la présidente de l’IVD Sihem Ben Sedrine et Me Taoufik Bouderbala, ancien président de la Commission nationale d’investigation sur les violations et les abus et ex-président de la LTDH. Sihem Ben Sedrine a annoncé sa décision de rouvrir les dossiers des anciens ministres de Ben Ali, acquittés par la justice sur la base d’expertises ordonnées en la matière, faisant valoir que les larges prérogatives de l’Instance Vérité et Dignité(IVD) sur la justice transitionnelle l’habilitent à rouvrir les dossiers des anciens responsables. Me Taoufik Bouderbala a réagi aux propos de Sihem Ben Sedrine, en précisant que lois nationales et internationales interdisent tout nouveau jugement des personnes déjà passés devant les tribunaux pour les mêmes faits et mêmes dossiers, sauf dans des cas exceptionnels où il est question de violations flagrantes des droits de l’Homme ou de torture.

Me Taoufik Bouderbala a rappelé à l’occasion ses réserves sur les circonstances de la création de l’Instance Vérité et Dignité et sa composition qui a obéi à des considérations partisanes, selon ses dires.

Pour sa part, l’Instance Provisoire de la Justice judiciaire a annoncé qu’elle portera plainte contre Sihem Ben Sedrine, présidente de l’Instance Vérité et Dignité(IVD) sur la justice transitionnelle, suite à l’annonce de sa décision de rouvrir les dossiers des anciens ministres de Ben Ali.

A cela s’ajoute donc la nouvelle déclaration de Noura Boursali qui met en question la neutralité des membres de l’IVD et la pertinence des textes législatifs la régissant.

Plusieurs questions attendent encore des réponses. Les juristes et des militants des droits de l’Homme restent vigilants quant à la neutralité et la crédibilité de cette instance, surtout après la dernière démission.

Issam khemakhem

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