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Houcine Dimassi à Africanmanager : « La Tunisie risque de s’appauvrir encore plus avec à la clé un déficit de 14 milliards de dinars »

Le Dinar tunisien ne va certainement pas faire exception et rompre avec la baisse observée depuis la Révolution au point que l’on ne s’attend pas à une grand-chose d’une économie qui n’est pas encore prête à amorcer une reprise, d’un environnement économique et financier aussi oppressant et verrouillé et d’un marché financier qui reste extrêmement tendu. A vrai dire, la baisse du dinar est aujourd’hui plus importante que jamais, et ce malgré les interventions régulières de la Banque Centrale de Tunisie (BCT) via des injections de liquidités en devises. La monnaie nationale n’a de cesse de dégringoler depuis plusieurs semaines. Le 16 octobre dernier, le Dinar Tunisien a connu une forte volatilité suite à l’instabilité observée sur les marchés internationaux. Le dollar s’était échangé entre 1.7910 et 1.8010. L’euro s’est maintenu stable aux alentours des 2.2900 oscillant entre 2.2870 et 2.2930.

Dans une interview accordée à Africanmanager, l’ancien ministre des Finances, Houcine Dimassi, a noté que, depuis la révolution, la parité du dinar par rapport aux principales monnaies étrangères de transaction n’a cessé de se dégrader à un rythme notoire. En effet, durant les quatre dernières années, le dinar s’est déprécié d’environ 22% par rapport au dollar américain et de 15% par rapport à l’euro, ce qui est excessif, a-t-il estimé.

Selon lui, deux principaux facteurs ont contribué à cette forte détérioration de la parité du dinar, à savoir l’amplification de l’inflation et le gonflement démesuré du déficit de la balance commerciale.

Dans le même contexte, l’ancien ministre des Finances a indiqué que, depuis longtemps, notre économie connaît un taux d’inflation relativement élevé, oscillant entre 5 et 6 % par an. Et d’expliquer que ce taux devient encore plus contraignant si on prend en considération le différentiel d’inflation avec notre principal partenaire commercial, à savoir l’Union Européenne. Dans cette zone, le taux d’inflation, selon Dimassi, se situe en moyenne à 1% par an, soit de 5 points de pourcentage en deçà de celui de la Tunisie. Par ailleurs, pour préserver sa compétitivité sur ce marché, la Tunisie est tenue de déprécier sa monnaie, selon ses dires.

Houcine Dimassi a expliqué ainsi la dépréciation du dinar par le déficit croissant de notre balance commerciale qui constitue le second facteur de la dépréciation du dinar avant d’ajouter qu’avant la révolution, le déficit de la balance commerciale se limitait à environ 3 milliards de dinars. « Depuis, ce déficit s’est dangereusement amplifié pour atteindre 9.4 milliards de dinars rien que pour les 8 premiers mois de l’année en cours », a indiqué Dimassi, soulignant qu’à ce rythme, l’année 2014 s’achèvera sur un déficit entre 13 et 14 milliards de dinars. « Cet effrayant déficit accélérera sans doute la dégradation de la parité du dinar dans la mesure où il altérera sensiblement nos réserves en devises ».

Jusqu’à présent, la BCT a réussi à temporiser un tant soit peu la dépréciation du dinar, sans la neutraliser complètement. Le dysfonctionnement structurel de notre économie ne pourrait en aucun cas être maîtrisé totalement et définitivement par les mesures conjoncturelles de la Banque Centrale.

Il a ajouté, dans le même contexte, que la détérioration sensible de la parité du dinar a des impacts nocifs sur le pays en général, et l’économie en particulier. Cette dépréciation de la monnaie nationale ne peut qu’appauvrir un pays comme la Tunisie où les importations dépassent presque constamment les exportations, a-t-il dit.

Sur le plan social, à l’exception des familles des émigrés, tous les citoyens subissent les effets négatifs d’une inflation importée s’ajoutant à l’inflation locale. Le budget de l’Etat souffre aussi énormément de la dépréciation du dinar dans la mesure où celle-ci contribue sensiblement au gonflement du service de la dette extérieure.

L’ancien ministre a ajouté, dans le même cadre, que l’enraiement de la chute du dinar nécessite d’immenses réformes de structures dont notamment l’arrêt de l’augmentation anarchique des salaires, l’amélioration de la productivité des entreprises, la reprise de la croissance normale des activités économiques stratégiques (agriculture, industrie, tourisme,…), et l’allègement sensible des dépenses de consommation.

Evoquant la déclaration récente du Chef du gouvernement, Mehdi jomâa, selon laquelle la Tunisie a besoin de trois années de reformes rigoureuses, Houcine Dimassi a reconnu que ce constat est tout à fait idoine « Plus même, il semble fort optimiste lorsqu’il limite la période d’attente avant la reprise à seulement 3 ans », a indiqué l’ancien ministre, soulignant qu’en réalité, l’économie tunisienne nécessite beaucoup plus de temps pour qu’elle reprenne correctement le chemin de la croissance, et ce au moins pour cinq principales raisons, à savoir l’ampleur des dégâts socio-économiques commis surtout par la troïka, nécessitant des longues années de réparation et les hésitations et turbulences des prochains gouvernements-mosaïques résultant de la poussière de partis politiques dont souffre le pays.

L’ancien ministre a évoqué, en outre, la persistance des revendications « insensées » des syndicats (plus de salaires et moins de travail), la situation chaotique en Libye et la dure crise économique en Europe.

Khadija Taboubi

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