AccueilLa UNETunis-Programme électoral d’Ennahdha : Rien que de la littérature!

Tunis-Programme électoral d’Ennahdha : Rien que de la littérature!

Par sa nouvelle démarche et son discours remanié, Ennahdha vient d’envoyer plusieurs messages à l’opinion publique tant nationale qu’internationale, aux décideurs mondiaux et, bien sûr, à ses partenaires locaux.

Le plus important de ces messages porte sur la nouvelle réalité qui interpelle la mouvance islamiste en Tunisie qui se sent définitivement dégagée de son isolement. Fort de cet état des choses, le parti Ennahdha s’en réjouit et veut le faire savoir à tout le monde et surtout à Nidaa Tounès . Ennahdha a longtemps jugé le Nidaa comme le principal artisan du renversement de la situation du 23 octobre2011, et de la marée humaine du Sit-in Errahil. Les Islamistes disent en demi-mot à ce parti : vous avez réuni tout le monde pour nous isoler, maintenant nous avons des ponts avec toutes les parties. Nous avons « prêté » à Hamma Hammami un député (Abdelaziz Ben Ahmed Chaabane, de Mahdia) pour compléter son dossier de candidature. Et on a tenu à l’annoncer pour mettre dans l’embarras le Présidentiable et révéler les dissensions au sein du Front Populaire (FP). En fait on a décidé de porter secours à Hamma Hammami lorsqu’on s’est aperçu qu’il n’a pas pu avoir le parrainage d’éminents députés de sa formation politique. Ahmed Néjib Chebbi qui a été une pièce maîtresse dans l’Union pour la Tunisie (UPT) a non seulement quitté l’Union mais a déclaré que son rapprochement avec le Nidaa était la plus grande faute jamais commise par Al Joumhouri , au moment où il a réaffirmé sa fierté d’être membre du gouvernement Mohamed Ghannouchi aux lendemains du 14 janvier 2011.

L’Ordre national des avocats de Tunisie (qui est membre du Quartet) appuie de manière énergique un des candidats sur lesquels nous misons, l’ancien bâtonnier Abderrazak Kilani qui a été un des ministres de la troïka, même si son initiative suscite les appréhensions de la part de plusieurs avocats. Les mots doux exprimés, mardi, par Lotfi Zitoun, sur un journal électronique de la place , envers l’UGTT, son Fondateur le Martyr Farhat Hached et son actuel Secrétaire Général Houcine Abassi qui a joué , selon Zitoun, un grand rôle pour désamorcer la situation pendant l’été et l’automne derniers en engageant le Dialogue national , montrent que nous n’avons plus problème avec personne , même si la Commission Administrative de l’UGTT a annoncé que les structures syndicales ne vont pas appeler à voter pour ceux qui se sont attaqués à leurs locaux.

S’adressant toujours au Nidaa, mais cette fois à Béji Caïd Essebsi (BCE) en personne, c’est Rached Ghannouchi lui-même qui lui rappelle que ses proches ont révélé ses problèmes de santé et un de ses concurrents aux présidentielles a même présenté un certificat médical attestant de sa bonne santé et l’a publié, ostensiblement, sur les réseaux sociaux. Et pour conclure, le même Rached Ghannouchi recommande à BCE, lorsqu’il l’a entendu évoquer les acquis du pays (son projet de société, son Etat moderne et civil et le statut bien spécial de la femme tunisienne) de ne pas diviser les Tunisiens.

Evidemment, le discours de l’unité, du consensus et de la concorde, repris à longueur de journée et de manière redondante par les dirigeants d’Ennahdha, vise en fait à gommer les différences, à faire oublier les pratiques d’hégémonie et d’arrogance menées par la troïka sous l’égide des islamistes , et mettre une sourdine aux critiques adressées à Ennahdha pour sa complaisance envers l’extrémisme religieux, le terrorisme et son engagement international en soutien à la nébuleuse islamiste sous couvert du printemps arabe.

Ennahdha s’emploie, sur un autre plan, à effacer l’effet négatif de son programme économique et social exhibé en octobre 2011 , et repris dans ses grandes lignes, en mai 2012, dans le programme « révolutionnaire » de relance économique et sociale du Gouvernement Hamadi Jébali , mais jetés tous les deux aux oubliettes et remplacés par un discours idéologique visant à islamiser le pays. Le nouveau programme qui s’inscrit dans l’étape que s’apprête à vivre la Tunisie caractérisée par la stabilité économique, politique, sociale et sécuritaire, sur la base du consensus présente-t-il les éléments de base d’un programme qui répond aux réalités du pays ?

Ce programme qui prône une économie sociale du marché, et vise à transformer  » l’économie de rente en une économie de concurrence et attribuer à l’Etat un rôle régulateur », ne revendique pas une affiliation quelconque à l’école tunisienne de la planification qui a œuvré depuis 1961 et de manière constante à préparer des plans quinquennaux qui annoncent les grands choix en matière de développement. Ces plans ont mis en place, au fil des décennies, le modèle de développement adéquat qui fonde l’économie du pays et l’entreprise à profiter des grands flux financiers(les investissements internationaux),matériels(échanges de services et de marchandises) et humains( flux touristiques et de compétences) , permettant en conséquence à la machine de production de s’adapter aux développements mondiaux, de s’y positionner de manière pertinente pour en optimiser le gain national.

En l’absence d’une telle logique et d’un tel mode de réflexion, le « planificateur » ne peut pas avancer le chiffre hautement synthétique du taux de croissance (ce programme prévoit une croissance de 5% sur les 3 ans à venir et de 7% à partir de 2018). Et à la place d’une démarche méthodique et claire qui a été adoptée depuis cinq décennies, le programme électoral d’Ennahdha n’avance rien de concret hormis les mesures « bateaux » du genre : une industrie dans les secteurs à grande productivité, une économie inclusive qui soutiendra les régions et un appui du rôle de la Tunisie régionalement, en Afrique et avec l’UE seront mis en place.

En fait, ce qui manque, c’est cette vision d’ensemble qui nous donne une idée sur l’origine de la richesse nationale, sur la machine qui la fait fructifier et sur l’articulation à l’économie mondiale qui rende cette dynamique continue. Au lieu de ce schéma, on a eu droit à de la littérature qui veut inventer la roue et ne s’apparente pas au patrimoine de l’administration tunisienne qui a tenu à réfléchir sur la situation économique et son devenir pour créer la richesse et la partager au mieux.

On est donc en face d’un grand ratage de la part d’Ennahdha. Ni sa démarche convainc, ni son approche en matière de développement présentée comme nouvelle ne parvient à nous faire oublier la mascarade des 365 mesures annoncées pour le scrutin de 2011. Et si on s’en tient à ce menu, on risque encore de perdre des années comme cela a été pour la triennie de la troïka.

Aboussaoud Hmidi

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