Un chiffre d’affaires en baisse en 2013 par rapport à 2012 et un déficit financier qui pourrait avoisiner les 160 MD par an si aucune action n’était entreprise. A lui seul, ce chiffre en dit assez long sur la situation financière de Tunisair. Avec un capital d’un peu plus de 106 MDT, l’entreprise a déjà complètement consommé son capital. Elle est juste sauvée du désastre, après que l’Etat a enfin décidé de prendre en charge ses dettes (162 MDT) auprès de l’office des aéroports.
Mais l’entreprise où l’Etat est actionnaire à presque 75 %, souffre de charges qui augmentent beaucoup plus que les recettes depuis la révolution, du coût du carburant et autres taxes aéroportuaires (lorsque le taux de change Dinar/USD passe de 1,4 à 1,5 cela veut dire une augmentation de 20 MDT de charges pour Tunisair, notamment pour le carburant. La taxation aéroportuaire est libellée en euros pour Tunisair), ainsi que d’une masse salariale hypertrophiée jusqu’à représenter 70% des charges, même si Tunisair a arrêté, depuis mars 2012, tout recrutement.
Ces quelques lignes résument brièvement mais de façon incomplète, la situation de Tunisair. Une entreprise publique qui n’arrête pas de sombrer. Et encore. Dans cet état des lieux, les dettes, bancaires et autres ne sont pas comprises. Auquel cas, la gazelle sombrerait corps et âme et devrait, juridiquement, au cours de sa prochaine AGO, étudier l’éventualité de cesser toute activité.
A fin mars, la trésorerie était déficitaire de 230 MDT. La compagnie gère au quotidien, mais la situation s’est quelque peu améliorée par la prise en charge par l’Etat de certaines dettes. 165 MDT OACA avec leurs pénalités, le gel de 128 MDT autres auprès de l’OACA, le règlement par échéancier sur 1 an et demi des 61 MDT de la SNDP et le rééchelonnement des cotisations employeurs de la CNSS qui sont de 14 MDT par trimestre et 10 MDT de taxes pour la TAV.
Personnel et direction restent pourtant confiants. Le management annonce en effet une «tendance à la hausse du trafic passagers qui se confirme. Du 1er janvier au 20 mars 2014, Tunisair a enregistré une croissance de 12,3% du nombre de passagers transportés par rapport à la même période de 2013, soit 72.681 passagers supplémentaires. Les capacités ont augmenté de 4,3%, d’où une croissance du coefficient de remplissage des appareils de 5,3 points qui a permis de réaliser 73.9% contre 68.6%, durant la même période en 2013. La compagnie prévoit aussi une saison été 2014 (30 mars-26 octobre 2014) prolifique avec le transport de 2,730 millions de passagers, soit une croissance de 8,5% par rapport à l’été 2013 et de 2,7% par rapport à l’été 2012. Sur toute l’année 2014, Tunisair estime que le nombre total de passagers qui seront transportés dépassera la barre des 4 millions, soit une croissance de l’ordre de 8,1% par rapport à l’année 2013».
– Tunisair n’ira pas au Canada.
La compagnie Tunisair va ouvrir une desserte régulière entre la Tunisie et l’Irak. En effet, la compagnie va desservir d’ici l’été 2014 une ligne Tunis-Erbil qui sera opérée à raison de deux fréquences par semaine (jeudi & dimanche à l’aller et vendredi & lundi au retour). A compter de l’été 2014, Tunisair va atterrir sur l’aéroport d’Accra au Ghana. Il s’agit d’une nouvelle desserte qui sera combinée avec celle d’Abidjan. Une 6e fréquence hebdomadaire entre Tunis et Francfort tous les jeudis, mais Tunisair ne volera pas vers le Canada. Une destination qui devait lui redonner des ailes. «Tunisair a différé à l’année 2015 la livraison de ses premiers Airbus A.330 (initialement programmés pour 2012). Dans sa stratégie commerciale, leur livraison permettra de desservir des lignes long-courrier dont notamment le Canada, destination sur laquelle la compagnie nationale a travaillé depuis une dizaine d’années et dont les efforts ont permis d’aboutir d’abord à des accords aériens entre les deux pays puis à l’obtention de 3 slots après négociations.
Au regard du report de livraison de ses gros porteurs, Tunisair avait conclu un accord avec la compagnie libyenne Afriqiyah qui portait sur l’enregistrement de certains de ses avions en Tunisie et leur intégration dans sa flotte. L’accord avec les Libyens ne s’est finalement pas concrétisé suite à un changement au niveau du management de cette compagnie. Il n’est donc plus possible en l’état actuel des choses d’ouvrir de ligne long-courrier durant l’été 2014 en l’absence d’appareils. Cependant, des discussions sont en cours avec Libyan Airlines pour suppléer Afriqiyah», explique ainsi la direction générale.
– Le gouvernement ne soigne pas. Il la maintient juste sous perfusion.
Les deux gouvernements, Jbali et Larayedh, ont carrément refusé de l’aider à survivre. L’actuel chef de gouvernement tunisien, Mehdi Jomaa, hésite encore à se saisir de la patate chaude. Tunisair se suffit, depuis quelques temps, aux promesses de son super-conseiller Nidhal Ouerfelli, de le persuader de sauver le transporteur national. Difficile à croire, lorsqu’on le voit préférer les avions de la concurrence pour ses déplacements à l’étranger. Mêmes le ministre du Transport et celle du Tourisme, n’ont pas daigné être présents lorsque la compagnie nationale honorait ses meilleurs partenaires et les 20 TO qui lui apportent des clients. Il faudra attendre les décisions du CIM qui se réunira, jeudi prochain, pour passer en revue ce qu’un Etat en déficit de plus de 2,5 milliard DT pourra faire pour une entreprise qui se meurt lentement.
Lors de la dernière réunion de la Commission ministérielle chargée de ce dossier, le ministère des Finances a accepté de prendre en charge les dettes de Tunisair auprès de l’OACA, lui a avancé 30 MDT pour le plan de départ à la retraite avec la promesse de lui remettre 15 autres MDT en 2015. Il a aussi donné son accord pour une garantie de l’Etat sur le financement de l’avion qui sera livré fin 2014. Pour remonter la pente, voici ce que Tunisair propose, selon son dernier communiqué de presse.
Khaled Boumiza
